La Révolution tunisienne, cette expression qui a fait le tour du monde et la Une de plusieurs journaux, qui s’est accompagnée d’un certain nombre de valeurs proclamées et qui ont émergé dans le reste du monde arabe, une révolution qui a du mal à dresser une Tunisie libre et démocratique où l’égalité des chances fait partie des acquis de ce grand peuple. Cette révolution qui a du mal à mener ces valeurs pour les implanter et les protéger des vautours du président déchu, encore au pouvoir… A lire toute la presse étrangère nous nous croirions dans un pays libre, alors qu’il n’en est rien… Bien qu’un certain temps est nécessaire pour arriver à une démocratie, quatre mois sont aussi suffisants pour commencer à sentir les premières lueurs de la liberté, malheureusement ce n’est encore pas le cas.
La révolution qui a poussé Zine El Abidine Ben Ali à la fuite le 14 janvier 2011 aurait pu être le point de départ pour mener à bien le bateau tunisien à travers les résidus d’un système corrompu jusqu’aux os, cette révolution aurait pu être un point de départ pour remettre ce train de liberté sur les rails, cette révolution aurait pu être le point de changement pour les médias pour reprendre faire leur travail correctement où ils avaient l’opportunité d’exercer un travail digne d’un pays au mi-chemin de la liberté, ces médias auraient pu encadrer ce train révolutionnaire pour mettre en public des faits, des noms et des incidents au lieu de présenter des sommes d’argent et ouvrir la caverne d’Ali Baba que tout le monde connaisse ses dessous et ses secrets. Les médias de masse ont les moyens pour faire pression et sont les seuls responsables de la déviation de la révolution de la dignité pour devenir une révolution des intérêts. Nous ne pouvons parler des journaux électroniques vu les structures limitées en moyens, ils font avec le peu qu’ils ont pour toucher une audience plus large et s’acharnent jour et nuit pour présenter le mieux qu’ils puissent faire.
Dans une société en transition, que ce soit démocratique, économique ou autre, le rôle des médias de masse n’est plus d’informer, ils devraient être la conscience morale de l’opinion publique et de la société civile.
Plusieurs dossiers de création de radios et télévisions ont été déposés, le seul souhait que partagent la majorité des tunisiens est sans doute la création d’une télévision qui fait son travail sans plus et non pas diffuser de la musique et des séries quand il y a des manifestants qui se font tabassés, avec un accès presse, il pourrait aller au cœur de la scène pour retransmettre des images réelles des différents angles, que ce soit du coté des manifestants que du coté des forces de l’ordre, chacun a droit à la vérité et la réalité des choses.
Bien que la Une des infos ne soit plus réservée au président déchu, le fonctionnement est resté le même. Les ordres viennent d’en haut et les journalistes les exécutent. Aucune discussion sur les choix des sujets à traiter, ni sur l’angle à adopter. Après tout, ce sont les mêmes personnes qui sont à la gérance, au meilleur des cas, une nouvelle personne ayant des antécédents avec l’ancien régime. Nous aurions bien aimé voir plus de liberté pour les journalistes pour parler des vrais problèmes et non pas passer à coté de la plaque. Les plateaux des télévisions sont bourrés par des partis politiques qui viennent faire l’éloge de la révolution, une révolution à laquelle n’ont participé guère.
Les médias ont fait tomber plusieurs personnes de hautes responsabilités. Dernière en date à en faire les frais, l’ancienne ministre française des affaires étrangères, Michèle Alliot Marie… ou celui d’il y a des années qui a fait mentir les présidents des États Unis, de Kennedy à Nixon, un dossier publié sur le journal The New York Times révélant des documents secrets du Pentagone traitant de la guerre au Vietnam, un dossier publié par un certain Daniel Ellsberg. Verrons-nous un temps où les médias feront tomber des ministres au lieu de vouloir calmer le jeu ?
La presse est libre. Plus libre que sous Ben Ali. Personne ne le conteste mais les habitudes de l’ancien régime pourraient reprendre le dessus avec toute cette fragilité, les vieux réflexes autoritaires de contrôle de l’information vont surgir à nouveau. Il n’est pas trop tard… mais il est temps.
Les tunisiens sont livrés à eux-mêmes, l’un des axes de la liberté peine à se relever et les partis politiques sont occupés par leur ménage interne et les postes qu’ils peuvent assurer lors des élections sans pour autant présenter un réel programme. Certes, il y a un malaise et une frustration mais ceci s’explique par ce sentiment amer que la révolution a été confisquée.