Le FPR remporte les élections parlementaires au Rwanda en l’absence de toute opposition et de tout espace démocratique

BRUXELLES, Royaume de Belgique, 9 octobre 2013/African Press Organization (APO)/ — La Commission électorale nationale du Rwanda (CEN) a annoncé les résultats définitifs des élections de la Chambre des Députés organisées les 16-18 septembre. La CEN a annoncé que 98,8% de la population ont voté lors de ces élections législatives qui ont été quasi entièrement financées par le gouvernement rwandais lui-même et qui ont enregistré le plus faible coût par électeur de l’ensemble du continent.

Comme il fallait s’y attendre, le Front patriotique rwandais (FPR) du Président Paul Kagame a gagné haut la main. Le FPR a obtenu 76,22% des voix pour les 53 sièges disponibles. Tout comme pour les élections de 2008, le parti social démocrate (PSD) et le parti libéral (PL) ont obtenu les seconde et troisième places, avec 13,03% et 9,29% des voix respectivement. Les autres partis politiques participants et les quatre candidats indépendants n’ont pas atteint le seuil des 5% requis pour pouvoir être représentés au sein de cette législature de la chambre basse rwandaise.

Conformément à la Constitution, 24 membres féminins, deux représentantes du Conseil national de la Jeunesse et une représentante de la Fédération des Associations des personnes handicapées ont également été élues à la Chambre des Députés. Grâce aux 24 sièges réservés aux femmes qui doivent être élues par leurs pairs, et grâce au nombre élevé de sièges remportés par des candidates féminines, le Rwanda continue d’enregistrer le taux le plus élevé de femmes parlementaires dans le monde.

Le taux élevé de participation aux élections est quelque peu en contraste avec le faible niveau d’intérêt apparemment affiché pour ces élections législatives par la population et les médias rwandais. Cela n’est pas tout à fait surprenant. Le choix des électeurs se limitait au FPR ou à des partis qui ne s’en éloignent que très peu, et la plupart des grands dirigeants de l’opposition sont toujours en exil ou en prison. Plusieurs partis ont également douté de la possibilité de participation tandis que d’autres ont été confrontés à des difficultés dans leur processus d’enregistrement.

La Ligue des Droits de l’Homme de la région des Grands Lacs (LDGL) avait organisé une mission d’observation des élections par la société civile à l’échelle nationale. Dans son rapport préliminaire, la LDGL indique que “le processus de vote était plutôt ordonné, mis à part certains incidents isolés” dont certaines irrégularités dans les procédures de dépouillement. D’une manière plus générale, la Ligue exprime des préoccupations quant au manque d’espace politique, à l’influence du gouvernement sur la CEN, à la complexité du processus d’inscription des candidats indépendants, et à l’allégeance des participants au collège électoral des 24 sièges réservés aux femmes. La déclaration préliminaire de la mission d’observation électorale de la LDGL ne contenait encore aucun commentaire sur les résultats annoncés par la CEN.

Le Rwanda a fait des progrès remarquables en matière de reconstruction et de consolidation de la sécurité interne après la dévastation de la guerre civile et du génocide de 1994, surtout par rapport à la croissance économique et à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Tout en étant un modèle africain de gouvernance technocratique et de développement économique, la gouvernance politique est défectueuse et les voix dissidentes ont fortement disparu du pays d’Afrique centrale. Actuellement, le Rwanda est caractérisé par un faible niveau d’espace démocratique, avec une liberté d’expression et des moments de répit limités pour la société civile (in)essentielle. Cette dernière a constamment été contrecarrée en exécutant sa mission, et elle s’est souvent vu confrontée à une ingérence de la part des autorités gouvernementales. L’opposition politique a été sérieusement affaiblie par des arrestations continues et d’importantes barrières administratives à sa participation dans le débat public. Les médias critiques sont quasi inexistants dans le pays.

C’est la raison pour laquelle EurAc demande à l’Union européenne et à ses Etats membres de :

– Reconnaître les indicateurs de fragilité du développement au Rwanda en abordant l’espace démocratique, les droits humains et le renforcement de la société civile dans le pays car elle est la clé de la stabilité, du développement et d’une gouvernance responsable à long terme dans le pays et la région au sens plus large.

– Continuer d’inclure le sujet de l’étroitesse de l’espace démocratique à l’ordre du jour de son dialogue politique avec les autorités rwandaises, y compris les entraves à la société civile par les autorités gouvernementales, l’environnement inhibé pour l’opposition politique, et le manque de liberté d’expression.

– Soutenir la société civile et les acteurs médiatiques indépendants, en terme de soutien financier, de renforcement des capacités, et d’appui politique.

– Développer une prise de position explicite sur la question d’une révision constitutionnelle allant à l’encontre de la possibilité d’une alternance politique.

– Favoriser la capitalisation pour documenter l’organisation positive de ces élections pour de futures références.

– Prévoir toutes les mesures nécessaires pour assister et protéger les défenseurs des droits humains et leurs organisations le cas échéant, en appliquant la Déclaration universelle des Droits de l’Homme des Nations Unies de 1998 .

Auteur de l’article : Agence-Presse

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