La FAO aide les Somaliens à rentabiliser les carcasses du bétail / Un projet financé par le Royaume-Uni valorise de 30 à 60 pour cent le bétail

MOGADISCIO, Somalie, 29 novembre 2012/African Press Organization (APO)/ — Suweisra Mohamed agite un os de dromadaire bien épais et sec avec un sourire rassurant. «Il vaut maintenant beaucoup de dollars», dit-elle, brandissant un gros fémur soigneusement découpé.

Cette énergique Somalienne de 47 ans vient de découvrir ce qu’elle décrit comme un trésor caché dans les déchetteries du Somaliland. En fait, des tas de restes d’animaux en décomposition jonchent les environs des abattoirs à travers la Corne de l’Afrique.

«Jusqu’à présent, nous avions coutume de jeter ces os qui nous semblaient inutiles, explique-t-elle. Mais maintenant, je me rends compte que nous avons, durant de longues années, jeté beaucoup d’argent par les fenêtres».

Suweisra est la présidente de l’Association pour le développement de la viande du Somaliland, une organisation locale qui rassemble une quarantaine de femmes et d’hommes dans cette région semi-autonome de Somalie baignée par le golfe d’Aden.

Une mine d’or

Chaque jour, des dizaines de milliers de chameaux sont abattus en Somalie, un pays où la viande figure en bonne place dans pratiquement tous les plats cuisinés. Des tonnes d’os, de peaux, de sabots et d’autres abats culturellement indésirables finissent à la poubelle.

Grâce à un projet financé par le Royaume-Uni, la FAO encourage les communautés locales à améliorer leurs revenus en traitant les peaux, en fabriquant du savon à partir de la moelle osseuse et en façonnant des œuvres artisanales avec les os des bêtes abattues. Dès la première année, cette initiative a débouché sur des résultats surprenants.

«Nous avons appris, grâce à la formation reçue, à couper soigneusement les os frais aux deux extrémités et à en extraire la moelle osseuse. Nous la portons à ébullition et la mélangeons à de la soude caustique suivant un processus très simple», indique une stagiaire du projet, décrivant le processus de fabrication du savon. Et comme rien ne vaut une démonstration, la voici qui utilise le savon à peine produit pour laver son fichu blanc à la main. «Cela marche à merveille!», jubile-t-elle.

Après deux décennies de guerres, de sécheresses et de sous-développement, la Somalie n’a presque plus d’industries indigènes capables de fournir au marché des produits de base comme le savon. Au Somaliland, moins touché par les conflits récents, le projet représente une lueur d’espoir et un exemple que le reste du pays pourrait suivre.

Beaucoup de choses peuvent être tirées des os de dromadaire car ils sont épais et durs. Au cours de la première année du projet, qui porte le nom de SEED, plus d’une centaine de stagiaires ont appris à fabriquer des colliers, des bracelets, des vases, des perles, des peignes et bien d’autres produits.

Valeur ajoutée

Dans la plupart des régions de Somalie, le bétail est vendu en fonction d’une évaluation visuelle. Les moutons de races locales pesant 35 à 40 kg valent de 320 à 340 dollars. La race Borana, qui peut peser jusqu’à 400 kg, vaut environ 930 dollars. Les dromadaires pesant 300 kg se vendent dans les pays du Moyen-Orient à environ 820 dollars la tête.

Les dromadaires représentent un énorme business en Somalie, avec une valeur d’exportation annuelle estimée à plus de 250 millions de dollars.

Avec les activités du projet SEED, la production intérieure de viande du pays est en train d’acquérir de la valeur ajoutée en exploitant ce qui n’était auparavant que déchets. Le Ministre du bétail du Somaliland, M. Abdi Aw Dahir Ali, affirme que la valeur du bétail augmente notablement lorsque les carcasses sont pleinement utilisées pour produire du savon ou des objets d’artisanat.

«Grâce à la production de savon et d’objets artisanaux, la valeur de chaque animal, qu’il s’agisse de chèvres, de moutons ou de dromadaires, augmente de 30 à 60 pour cent, ce qui est un bienfait sans précédent pour notre peuple», selon le Ministre. Et M. Dahir Ali d’ajouter: «Voilà le genre d’activités qui, nous le croyons fermement, aidera les gens à sortir du cercle vicieux de la pauvreté.»

Lentement mais sûrement, savon et produits artisanaux poursuivent leur percée sur le marché somalien. On projette à présent de généraliser ces idées dans toute la Somalie, afin de créer plus d’emplois et de revenus dans ce pays déchiré par les conflits armés. Jusqu’à présent, 120 jeunes Somaliens, notamment de jeunes femmes, ont été formés et ont commencé à produire des tonnes de savon et des centaines de colliers, de cuillères, de peignes et de vases vendus sur le marché local.

Intensification de SEED

Un des principaux résultats du projet est le renforcement de l’économie somalienne grâce au développement des filières de l’élevage et de la pêche.

Mme Joanna Reid, Directrice du Département britannique pour le développement international (DFID) en Somalie, indique que la stabilité en Somaliland et des investissements suffisants dans la filière élevage devraient laisser espérer une croissance rapide du marché dynamique de cette région.

Pour développer fortement ces filières, le DFID a lancé avec la FAO, le PNUD, l’OIT et Save the Children toute une série d’interventions. Après l’achèvement de la première phase du projet SEED en juillet 2012, la deuxième phase vise maintenant à créer des milliers d’emplois durables en Somalie.

«Dans la première phase, nous avons réussi à démontrer qu’emplois et revenus peuvent provenir de rebus comme les carcasses. Dans la deuxième phase, nous renforçons notre action en l’élargissant à des domaines tels que le tannage du cuir et la production de biogaz et de fumier», indique M. Luca Alinovi, Représentant de la FAO en Somalie.

Auteur de l’article : Agence-Presse

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